Nerona d’Hélène Frappat : un roman dystopique sur une souveraine moderne et ses dérives autoritaires
Introduction : une fiction qui interroge le pouvoir et ses excès
Au cœur de l’Europe, l’auteure Hélène Frappat mêle fiction et réalité pour dépeindre une figure de pouvoir exacerbée. Son roman “Nerona” brosse le portrait d’une dirigeante autoritaire, autoproclamée “le Prince”, qui gouverne par décret et impose son agenda à travers une biais paranoïaque et climatosceptique. La protagoniste, fondatrice du parti FEU (Force, Énergie, Union), incarne une figure politique qui pourrait évoquer certains profils contemporains, notamment en raison de ses idéologies et de sa volonté d’effacer toute déviation dissidente.
Un projet politique cynique au centre du récit
Dans cet univers narratif, Nerona porte un projet controversé : la construction d’un pont reliant le continent à l’Île des Confins, où seraient internés des migrants illégaux. Ce projet, présenté comme un symbole de pragmatisme gouvernemental par la dictatrice, traduit aussi un cynisme profond, soulignant la dureté de ses mesures. La figure de Nerona pourrait faire penser à certains dirigeants d’Europe, tels que Giorgia Meloni, présidente du Conseil italien, en raison des similitudes idéologiques évoquées dans le roman.
Thématiques et engagement de l’auteure
Une œuvre ancrée dans la réflexion féministe sous l’angle humaniste
Romancière et essayiste engagée, Hélène Frappat a publié plusieurs ouvrages, dont un dernier essai intitulé “Le Gaslighting ou l’art de faire taire les femmes” (2023). Convaincue que le féminisme doit évoluer vers une perspective plus large, elle privilégie l’expression de l’humanisme, visant à défendre tous les êtres humains face aux discriminations. Dans “Nerona”, cette approche se traduit par une exploration des menaces qui pèsent sur le langage et la liberté.
Une représentation fictionnelle d’une figure extrême et ses inspirations
Le personnage de Nerona, dont le nom évoque Néron, empereur romain connu pour sa violence légendaire, symbolise une forte figure d’autoritarisme à l’extrême droite européenne. Le parti FEU, représenté par une flamme tricolore, évoque des courants politiques similaires, tels que Fratelli d’Italia ou encore le Rassemblement National français. La narration dépeint une leader hostile aux féministes, aux intellectuels, et qui prône des valeurs conservatrices, tout en dénonçant la presse et le wokisme. Il pourrait sembler que l’écrivain ait exagéré certains traits, mais le contexte politique actuel peut parfois dépasser la fiction.
Une influence et une inspiration tirées de figures politiques contemporaines
Le nom “Nerona” fait référence à Néron, associé à la violence et la légende d’un incendie ravageant Rome. L’auteure explique s’être inspirée de la personnalité de Giorgia Meloni, en soulignant qu’elle a volontiers emprunté certains traits et discours de cette figure politique dans l’élaboration de son personnage. Elle confie que cette fascination, mêlant rêve et cauchemar, a permis de concevoir un personnage à la fois captivant et inquiétant.
Une narration cinématographique et une mise en perspective politique
Le roman se distingue par sa structure narrative composée de points de vue alternés, évoquant un montage cinématographique, avec des effets de champs et contre-champs. L’influence du septième art est renforcée par la présence d’un film fictif, “Le pont de la vérité”, avec Julia Roberts, qui raconte la chute d’un pont, symbolisant la vulnérabilité face à la dictature et ses conséquences. L’un des messages clés du récit souligne que la dictature a un prix, celui de la révolte imminente, que personne ne peut totalement éviter.
Conclusion : une œuvre provocatrice et réflexive
Grâce à ce roman, Hélène Frappat invite à réfléchir sur l’autoritarisme, les dérives identitaires, et la menace que ces figures peuvent représenter, tout en soulignant qu’il pourrait y avoir un coût à l’exercice du pouvoir absolu. “Nerona” offre ainsi une vision critique et vivement actuelle, mêlant fiction politique,Symbolisme historique et analyse sociétale.