Blocage évité de justesse et poursuite des débats autour du budget de la Sécurité sociale
Contexte budgétaire et résultats du vote initial
À l’Assemblée nationale, la partie recettes du projet de budget de la Sécurité sociale a été adoptée samedi par une courte majorité (176 voix pour, 161 contre). Cette progression a permis de poursuivre l’examen du texte sur la partie dépenses, qui prévoit notamment la suspension de la réforme controversée des retraites.
Réactions et positions des principaux acteurs
Jean-Luc Mélenchon, leader de La France insoumise, a critiqué le Parti socialiste ainsi que les écologistes et les communistes, les accusant d’avoir soutenu le PS par abstention ou vote contraire. Selon lui, ces députés avaient été élus sur un programme différent et, selon lui, seule LFI aurait tenu parole en votant contre le budget.
Pour Olivier Faure, le président du PS, le vote des opposants de droite et d’extrême droite aurait constitué «le jeu du pire», alors que le PS avait voté en faveur de la partie recettes et soutenu une gauche utile pour les Français.
Par ailleurs, les discussions ont mis en lumière des dissensions autour des alliances et des stratégies entre les formations de gauche et de droite sur l’ensemble du texte.
Mesures et dispositifs liés aux recettes
Par ailleurs, l’Assemblée a entériné l’instauration d’une participation minimale pour les ressortissants étrangers non européens bénéficiant de la protection universelle maladie, une disposition visant notamment certains retraités américains installés en France. Un amendement du député Horizons François Gernigon a créé une cotisation obligatoire pour les ressortissants non européens titulaires d’un visa long séjour «visiteur», afin de conditionner l’accès et le maintien des droits au titre de la protection universelle maladie.
Un sous-amendement visant à préciser les conditions a été adopté pour exclure certains bénéficiaires, parmi lesquels des réfugiés et des ressortissants de pays disposant d’une convention bilatérale, comme l’a expliqué Paul Christophe, président du groupe Horizons.
Évolutions économiques et propositions formulées
Le «deal fiscal» et les perspectives pour les entreprises
Edouard Philippe, candidat à l’élection présidentielle, a évoqué une «politique économique de prospérité» centrée sur un pacte fiscal d’envergure avec les entreprises. Son idée repose sur une réduction d’impôt de production d’environ 50 milliards d’euros par an, compensée par une réduction équivalente des dépenses publiques, le tout présent sur un quinquennat. Il propose que ce pacte devienne un pilier du cadre fiscal et réglementaire, afin de favoriser la production et l’investissement tout en répondant à des objectifs budgétaires.
Selon lui, ce «deal» viserait à simplifier l’action publique et à instaurer une relation de confiance entre l’État et les entreprises, tout en privilégiant l’offre sur la demande.
Débats fiscaux et rapports entre partis à droite
Dans le sillage de ces débats, plusieurs responsables de droite ont dénoncé ce qu’ils ont qualifié de débordements fiscaux et ont défendu une orientation axée sur la politique de l’offre afin de stimuler l’emploi et l’investissement. Les discussions ont aussi porté sur la taxation du patrimoine et sur les risques potentiels d’un choc fiscal.
Au fil des échanges, deux victoires de la droite ont marqué la journée : la défiscalisation intégrale des heures supplémentaires et l’idée d’indexer le barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation, ce qui aurait privé le budget d’environ 2 milliards d’euros de recettes.
En parallèle, la gauche a tenté de limiter des dépenses coûteuses telles que le crédit d’impôt pour les services à la personne, une bataille qui a dégagé des lignes rouges sur le coût pour l’État et les bénéficiaires.
Motion de censure et équilibres parlementaires
La séance a aussi été marquée par des tentatives de censure contre le gouvernement. La première motion, déposée par La France insoumise et d’autres forces, a été largement rejetée, avec 271 voix pour une majorité encore insuffisante pour renverser l’exécutif. La seconde motion, de protestations venues du Rassemblement national, n’avait selon les participants pas de chance d’aboutir.
Le gouvernement a ainsi échappé à deux motions de censure, et le Premier ministre a annoncé vouloir entamer les travaux budgétaires sans tarder, en se disant prêt à faire évoluer le calendrier si nécessaire.
Réactions institutionnelles et avertissements économiques
Sur le plan international, le commissaire européen à l’Économie, Valdis Dombrovskis, a souligné que la suspension de la réforme des retraites aurait des implications budgétaires importantes et a appelé la France à prendre des mesures pour respecter ses engagements de réduction du déficit.
En parallèle, François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, a averti du risque d’un «étouffement progressif» des finances publiques, tout en précisant que le pays ne connaît pas une menace de faillite immédiate. Il a également évoqué les effets possibles sur les emprunts et le coût du crédit. À ce sujet, les débats ont aussi porté sur une fiscalité plus équitable et la nécessité d’un consensus sur les mesures de justice fiscale.
Taxe Zucman et justice fiscale en discussion
Le parlement a examiné une proposition dite «taxe Zucman» en version «light», qui viserait à instaurer un impôt minimum sur le patrimoine des ultra-riches afin d’atteindre l’objectif d’un impôt équivalent à 3% au-delà d’un certain seuil; initialement, la proposition évoquait un seuil autour de 100 millions d’euros et un taux de 2%. La version débattue prévoit néanmoins des exclusions pour certaines entreprises innovantes et familiales.
Du côté des forces de droite, Bruno Retailleau a déclaré que le projet de budget était invotable dans sa forme actuelle et a appelé à ne pas exclure le débat, y compris celui lié à d’éventuelles censure. Face à cela, certains candidats affirment qu’un redressement budgétaire passe par une simplification administrative et un cadre plus favorable à l’activité économique.
Perspectives et suite du calendrier parlementaire
Alors que le calendrier parlementaire se poursuit, le Sénat – majoritairement contrôlé par la droite et les centristes – a averti qu’il pourrait rétablir la réforme des retraites si l’Assemblée optait pour sa suspension, rappelant les enjeux budgétaires et le risque d’un déficit important à moyen terme.
Le président du Sénat a insisté sur l’importance de ne pas adopter une solution qui dégraderait durablement les finances publiques et a mis en avant la nécessité d’un cadre budgétaire stable et crédible pour les années à venir.