L’impact d’une minorité de 15 % sur le résultat d’un scrutin en Suisse

Une majorité d’habitants exclue du processus électoral en Suisse

Imaginons la population suisse comme un village comptant 100 personnes. En moyenne, seulement 28 citoyens prennent part aux votes nationaux, ce qui représente une participation relativement faible. Parmi eux, près de 32,5 % (soit environ un tiers) choisissent de ne pas aller voter, ces abstentionnistes restant une composante majeure du scrutin. Les 40 citoyens restants, en revanche, sont conditionnés par leur âge ou leur nationalité, ne pouvant tout simplement pas voter. En effet, ils sont soit trop jeunes, soit dépourvus de la nationalité suisse, excluant ainsi ces résidents du processus démocratique.

Le droit de vote réservé à une moitié de la population genevoise

Dans certaines régions comme Genève, la situation est encore plus contrastée. Seul un électeur sur deux peut exercer son droit de vote. Cette réalité a parfois été perçue comme un défi pour la démocratie. Elle a probablement motivé les démarches visant à étendre le droit de vote aux étrangers résidant en Suisse romande. En particulier, les cantons de Vaud, Neuchâtel et le Jura ont permis aux non-Suisses de participer aux élections communales, avec une extension progressive à l’échelle cantonale dans ces deux derniers départements. Aujourd’hui, la majorité de la population locale – environ 80 % – peut voter dans ces contextes, contre seulement 50 % en Genève et à Vaud.

Participation limitée des étrangers aux élections malgré leur droit de vote élargi

Cependant, cette extension du corps électoral ne se traduit pas nécessairement par une influence marquée sur le résultat des scrutins. Lors des consultations récentes dans ces régions, seulement 26 à 28 % des résidents étrangers ont voté. Ce faible taux de participation s’explique notamment par une désaffection des nouveaux électeurs, avec moins de 13 % des étrangers ayant exercé leur droit de vote lors du scrutin prévu le 24 novembre 2024 à Neuchâtel. En comparaison, plus de 40 % des citoyens suisses se sont exprimés lors de cette même échéance.

Les raisons derrière la faible implication des électeurs étrangers

Ce décalage s’explique notamment par le sentiment d’insécurité des communautés étrangères, comme le soulignait Rosita Fibbi, chercheuse à l’Université de Neuchâtel. Lors d’une interview accordée à “Le Temps” en 2023, elle évoquait le cas des communautés espagnoles et portugaises. Selon elle, ces populations considèrent qu’elles ne se sentent pas totalement chez elles en Suisse en raison de leur situation souvent instable, caractérisée par des contrats de travail et de logement résiliables à tout moment. Par ailleurs, elles font face à des attitudes discriminatoires qui renforceront leur sentiment de marginalisation, ce qui peut nourrir leur intention de revenir dans leur pays d’origine à la retraite.

Une intégration du droit de vote des étrangers davantage développée en Suisse romande

Ce phénomène montre que le droit de vote des étrangers a connu un certain développement dans la région de la Suisse romande, où une part importante des résidents étrangers bénéficie désormais du droit de participer aux élections locales. Toutefois, la faible participation demeure un défi pour renforcer l’impact politique de cette majorité d’électeurs potentiels, un enjeu crucial pour la démocratie locale et nationale.

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